Article rédigé par MYRIAM PANARD, consultante en lactation certifiée IBCLC pour Lansinoh France
Que vous soyez enceinte avec un projet d’allaitement ou que vous allaitiez déjà exclusivement votre bébé, vous vous posez sûrement des questions sur l’usage du biberon ? ou bien c’est votre conjoint qui vous en parle car il aurait envie de participer à l’alimentation de bébé ?
Il est donc important d’aborder ce sujet même s’il est vrai que le biberon n’est nullement un passage obligé puisque certains bébés ne passeront en fait jamais par la case biberon. En effet, si vous bénéficiez par exemple d’un congé parental ou si vous ne reprenez votre activité professionnelle que lorsque votre bébé a 7- 8 mois, celui-ci pourra très bien manger de la nourriture solide et boire dans un gobelet ou une tasse à bec durant votre absence et continuer ses tétées lorsque vous serez ensemble. En revanche, si comme la majorité des Françaises vous devez reprendre le travail lorsque votre bébé n’a que 3 ou 4 mois, la question de l’introduction du biberon se posera à un moment ou à un autre même si vous souhaitez poursuivre votre allaitement et lui donner votre lait le plus longtemps possible à voir à ce sujet notre article dédié Combiner reprise du travail et allaitement En tout cas, cela reste avant tout un choix personnel plus ou moins motivé par les circonstances de votre vie. Alors comment faire pour ne pas perturber la succion de votre bébé et qu’il ne se mette pas à refuser le sein ? Quel est le meilleur moment pour commencer à lui proposer un biberon ? Est-il préférable que ce soit une autre personne qui le lui donne? Et questions pratiques : existe-t-il des biberons plus adaptés que d’autres, quelles quantités prévoir, faut-il chauffer le lait ? Voici quelques réponses à vos interrogations :
Aucun biberon ne saurait remplacer l’allaitement maternel au sein.
1. Attention à ne pas introduire le biberon trop tôt ! mais pas trop tard non plus !
Tout d’abord, si votre nouveau-né a des difficultés à prendre le sein ou si vous êtes séparés juste après l’accouchement, le fait de lui donner un biberon dès ses premières heures ou premiers jours de vie peut être délétère pour les débuts de votre allaitement. Les premières tétées sont avant tout des expériences sensorielles très fortes qui font partie de l’apprentissage naturel de votre bébé alors guidé par ses réflexes archaïques et par vous-même, sa maman. Or, même si ses réflexes de succion et de déglutition se sont déjà développés durant sa vie intra-utérine (succion du pouce ou du cordon ombilical, ingestion du liquide amniotique), c’est à sa naissance que votre bébé découvre le sein, sa nouvelle source de nourriture terrestre et émotionnelle. Il lui faudra alors apprendre à coordonner succion, déglutition et respiration, or pour faciliter cette transition Dame Nature a prévu de petites quantités de « colostrum », votre premier lait àvoir à ce sujet notre article dédié Le colostrum . Par conséquent, si d’emblée votre nourrisson reçoit un biberon, non seulement il va intégrer les forts stimuli de la tétine contre son palais mais il va aussi recevoir un liquide plus fluide qui coulera souvent trop vite dans sa bouche, ce qui peut compromettre fortement sa succion au sein. Il pourra alors sembler perdu ou agité parce qu’il ne saura pas prendre le sein et s’il y parvient tout de même il pourra se sentir frustré par un flux moins rapide. C’est à ce moment-là que l’on parle de confusion sein-tétine. Il vaut donc mieux, les premiers temps, utiliser d’autres moyens pour nourrir votre bébé s’il ne prend pas encore le sein ou très difficilement : petite cuiller, petite tasse, DAL*, doigt et seringue, soft-cup (biberon-tasse). Si vous êtes dans cette situation, nous vous recommandons un accompagnement par un(e) consultant(e) en lactation qui vous guidera dans la mise en place de votre allaitement.
Pour toutes ces raisons, sauf cas particuliers, il vaudra mieux attendre que l’allaitement au sein soit bien établi avant de proposer un biberon à votre bébé. S’il tète efficacement et sans douleur pour vous, il ne devrait pas avoir de difficulté à alterner sein et biberon.
Si vous êtes du genre inquiète et craignez que votre bébé refuse catégoriquement le biberon lorsque vous allez reprendre votre travail (et c’est en effet parfois le cas vers 4 ou 5 mois), vous pouvez tranquillement habituer votre bébé au biberon dès la fin de son premier mois (à condition que votre allaitement se passe bien) ou un peu plus tard bien sûr, lorsque vous vous sentez prête ! L’idée est qu’il prenne l’habitude de boire un peu de votre lait au biberon donné de préférence par une autre personne que vous et ce deux ou trois fois par semaine ou quotidiennement , c’est à vous de décider en fonction des circonstances. Il n’est pas nécessaire que cela remplace complètement une tétée, cela peut être « un petit apéritif » ou « un petit dessert », cela peut aussi être à l’occasion d’une petite sortie que vous prévoyez sans bébé (cours de gym, séance piscine, rdv chez l’esthéticienne, chez le coiffeur…). A vous d’explorer et de trouver ce qui vous convient le mieux !
2. Attention : Il y a l’art et la manière de donner le biberon.
Si vous gardez votre bébé plutôt allongé dans vos bras avec un biberon en bouche bien incliné sous prétexte de remplir la tétine de lait, le flux de lait sera de fait accéléré ; c’est très inconfortable pour le bébé, on pourrait même dire que cela ressemble à du gavage, le contenu du biberon étant souvent bu trop rapidement de cette manière. Mais comme les bébés ont une grande capacité d’adaptation, ils prennent le pli, et c’est alors le meilleur moyen pour qu’ils se mettent à bouder le sein ! En effet, la succion au sein est beaucoup plus active, le bébé devant d’abord réaliser une prise étanche autour de l’aréole avec une bouche grande ouverte, puis stimuler le sein avec des mouvements rapides puis plus amples de compression des mâchoires, sa langue réalisant en même temps des mouvements subtils d’avancée, de montée, de descente telle une vague. Il est aussi important de préciser que le lait venant directement de la source arrive souvent moins vite et rarement en continu dans la bouche du bébé sauf en cas de REF (réflexe d’éjection fort) àvoir à ce sujet notre article dédié Le REF .
Force est de constater qu’ un bébé allaité a l’habitude de s’accorder de luimême des pauses au cours de ses tétées, ou si le lait jaillit trop vite il s’en échappe, il a le libre contrôle. Du coup, un repas pris au biberon devrait durer au minimum une vingtaine de minutes, permettant ainsi au bébé de ne pas perdre la sensation de satiété qu’il connait en général au sein.
Pour bien faire, il est important que votre bébé soit assis à 45° et qu’il puisse avoir l’arrière de la tête libre. On lui propose la tétine du biberon en lui chatouillant le menton et la lèvre supérieure pour déclencher comme au sein son réflexe d’ouverture de bouche accompagné d’une légère inclinaison de la tête vers l’arrière , ses lèvres devraient être bien retroussées autour de la tétine, celle-ci bien étirée jusqu’au fond de sa bouche en contact avec son palais. De plus, le biberon devrait toujours être gardé à l’horizontal durant tout le repas et, comme au sein le bébé devrait pouvoir faire des pauses, le biberon pouvant être abaissé pour stopper le flux en suivant le rythme du bébé. Cette manière de faire imite en quelque sorte l’expérience au sein même si les sensations sont évidemment différentes pour le bébé, cela permet en tout cas de limiter les risques de refus graduel du sein.
3. Réponses pratiques : le choix du biberon, les quantités, la température
Il vaut mieux choisir un biberon avec une tétine souple et étirable que votre bébé pourra alors bien sentir au niveau de son palais mou. Cela lui permettra de placer sa langue convenablement et de se mettre à téter comme au sein. Le débit de la tétine devrait aussi être le plus faible possible afin de garder le bébé plus actif.
La tétine péristaltique NaturalWave ™ des biberons Lansinoh a d’ailleurs été conçue pour que le bébé fasse les mêmes mouvements de langue qu’au sein. Pour votre information, il s’agit de mouvements péristaltiques, c’est-à-dire en vagues, bien observés dans les études réalisées pour comprendre le mode de succion du bébé.
En ce qui concerne les quantités, un bébé exclusivement allaité prendra en général de plus faibles quantités comparées à celles prises au même âge par un bébé qui n’aurait été nourri qu’au biberon depuis sa naissance, en cas de tire-allaitement par exemple à voir à ce sujet notre article dédié « Le tire-allaitement ».
Pour commencer, il vaut mieux en tout cas prévoir de toutes petites quantités, 30ml par exemple, puis en fonction de ce que vous voulez faire, augmenter progressivement les quantités. Tout dépendra de l’âge de votre bébé et de la fréquence de ses tétées au moment où vous souhaitez introduire le biberon.
Et pour finir, il est préférable pour le confort digestif de votre bébé de chauffer le lait (au bain-marie par ex ou au chauffe-biberon, jamais au micro-ondes) car vous savez sûrement que lorsqu’il coule de votre sein il est à température corporelle. Attention donc à ne pas lui donner du lait qui sort du réfrigérateur, cela risquerait de lui faire mal au ventre et il pourrait très bien le refuser d’emblée à voir à ce sujet notre article dédié Conservation et manipulation du lait maternel
Des milliers de mamans peuvent témoigner de la grande capacité d’adaptation de leur bébé allaité qui arrive à alterner sein et biberon sans aucune difficulté, tel un enfant bilingue qui jongle avec ses deux langues en fonction des circonstances et des personnes en présence : « Je suis avec ma maman, je tète ; elle n’est pas là, je prends le biberon » Pour la petite histoire, il m’est arrivé dans ma pratique de consultante en lactation de soutenir des mamans qui avaient dû suspendre leur allaitement (pourtant bien établi) pendant plusieurs semaines pour des raisons médicales particulières, et qui, grâce au maintien ou à la relance de leur lactation avec un bon tire-lait électrique et la confiance qu’elles avaient en elle et en leur bébé, reprenaient un allaitement au sein malgré une longue parenthèse d’usage exclusif du biberon.
Tout est possible, chaque situation est unique et il ne sert à rien de diaboliser le biberon, apprenons simplement à l’utiliser à bon escient et continuons à protéger, promouvoir et soutenir l’allaitement maternel !
Si vous avez envie de partager votre expérience personnelle sur le sujet, n’hésitez pas à échanger sur nos réseaux sociaux.
*DAL : Dispositif d’Aide à la Lactation composé d’une sonde de nutrition plongée dans un flacon contenant du lait et avec laquelle le bébé sera nourri au doigt ou au sein.